La justice, un thème inhérent à toute organisation sociale. Et dans une entreprise me direz-vous ? En entreprise, la justice est sous-jacente, peu verbalisée et pourtant hyper présente.

Comme dans un mini état, on trouve l’exécutif qui décide, le législatif pour poser les normes et les processus, et enfin logiquement, la justice pour évaluer, sanctionner.

Ici l’idée est de se pencher sur son côté sombre, oublié. Appelée la revanche silencieuse, je la décris brièvement, puis ses conséquences et enfin quelques clefs pour ajuster en mode agile.

justice une sorte d'équité

1- Notion de revanche silencieuse

La revanche silencieuse est cette justice de l’ombre, délicat, individuelle. C’est celle des talents vis à vis de l’entreprise ou de la Maison dans laquelle ils travaillent. En effet, les collaborateurs, eux aussi, ont le pouvoir d’ajuster selon leur perception. Une sorte d’équilibre donner/recevoir qui leur convient ou non.

Et vous me voyez venir, cette notion s’avère très personnelle, sensible, subtile. Elle a été décrite, entre autres, par Jean-François Bertholet, professeur à HEC Montréal.

Cette forme de justice sait se faire oublier, jusqu’au jour où elle vous explose en plein visage. Et si vous ne l’avez pas encore identifiée, préparez-vous, avec par exemple sur la musique de Pirates des Caraibes (!).

Chaque personne a un seuil de tolérance plus ou moins élevé en ce qui concerne l’injustice. Il va au-delà des genres et des cultures.  Même si, on sait que les femmes sont plus facilement satisfaites ou ressentent moins d’injustice lors d’une augmentation modeste que leurs collègues masculins.

Des études ont montré que dès 18 mois un enfant sait reconnaître l’injustice, pour un gâteau, pour des cadeaux… alors imaginez pour un adulte de 28, 38 ou 58 ans !

La revanche silencieuse est le fait de garder pour soi cette injustice. Le silence n’est pas trop grave, me direz-vous, même si ce n’est franchement pas terrible. Et souvent la rancœur peut suivre et engendrer, souvent, la nécessité de rétablir la justice soi-même. C’est une question d’équilibre individuel, c’est tellement humain.

équipe agile qui s'exprime

2- Les conséquences

Dans les faits, ce phénomène, plus ou moins conscient peut prendre des formes différentes. Ainsi, par exemple, un talent fait des heures supplémentaires, qui ne seront pas payées, il partira plus tôt le lendemain, là, c’est perçu comme normal. Ou alors il s’occupera de choses personnelles pendant quelques heures au bureau, là on sent le début de la déviance.

Quand le déséquilibre est trop grand, le collaborateur a l’impression de donner beaucoup vs ce qu’il reçoit, de ne pas être reconnu, récompensé en fonction de son effort, par rapport à d’autres. C’est une impression, qui peut avoir des fondements réels ou non.

La réaction (qui contient bien le mot action) peut se traduire par diverses manières.

Cela peut aller de la rétention d’informations, plus ou moins clés, en passant par le sabotage de réunions, de projets, à l’atteinte de la réputation de l’entreprise… jusqu’à la fraude. Cela peut aussi prendre la forme de se faire porter pâle ou de tomber vraiment malade (ici ce n’est pas conscient). Ou encore, on constate que certains de quittent l’organisation en donnant leur démission, quand les talents sont vraiment écœurés par l’inégalité.

Quand on sait ce que coûtent les salaires, charges, le recrutement, la formation et le suivi de talent, la revanche silencieuse s’avère, alors, vraiment contre-productive.

possible d'être actif dans la justice

3- Proposition de solutions agiles

La question se pose alors de comment y remédier ? Comment rétablir la justice et son pendant, la confiance pour éviter que les collaborateurs aient envie de réajuster à leur manière.

La transparence, dans un premier temps, améliore les choses. Dans les actions et les décisions concernant les traitements, les attributions, la reconnaissance, le managment communiquera de manière claire et sincère. Pas toujours évident dans un contexte de crise, de stress auxquels, les managers sont soumis.

Ensuite sur une base régulière, dans les meetings ou en entretiens individuels, les collaborateurs doivent savoir qu’ils peuvent s’exprimer. Et surtout qu’ils seront écoutés et compris. Pour cela, il est intéressant de créer un cadre sécurisé et instaurer des temps de parole, pour qu’ils puissent dire ce qu’ils ressentent ou quelle est leur perception des situations.

L’implication permet l’adhésion des troupes aux décisions ou processus. Ainsi, il est judicieux de permettre aux équipes d’être impliquées dans leur élaboration. Ceci va pour ce qui semble relever du détail, comme l’attribution des places de travail, ou de matières plus importantes, comme les récompenses ou d’autres avantages proposés par l’entreprise. Les décisions prises au consensus sont reconnues bien plus puissantes, puisque tous ont donné leur accord.

Dans le processus de décision une élection dite « sans candidat » est aussi un début de solution permettant la reconnaissance et le consensus.

Pour plus d’aide, vous pouvez vous adresser au département de la gestion des talents de votre entreprise afin de demander des formations idoines sur la prise de décision au consensus, l’écoute active, la communication bienveillante, les méthodes agiles ou tout autre sujet qui permettrait de veiller à la justice en interne.

Conclusion

Qu’on se rassure une justice parfaite est utopique. Le concept du « fair enough » ou de « fair play » sera déjà bien. En effet, les talents ont conscience que tout n’est pas idéal. Le concept d’équité, préféré à l’égalité, prend du sens en entreprise. Ainsi, pour se prémunir de ce phénomène de revanche silencieuse, la solution reste de communiquer avec tous. Une sorte de poncif, à la différence que, une fois qu’on en a conscience, on s’attache plus à la manière d’impliquer pour éviter ce sentiment d’incompréhension, d’injustice.

Auteur: Sophie-Armelle Rinieri

Sources :
https://hq.hec.ca/fr/animateurs/jean-francois-bertholet/
https://www.bertholet.ca